• Episode 4

    " Alix était partie depuis un mois déjà. Son absence se ressentait dans la maison mais il fallait se faire une raison. La vie continuait malgré tout et elle n'avait pas tardé à recevoir quelques nouvelles de la belle. Alix et Raynald étaient à bel enseigne dans une somptueuse demeure aux allures victorienne, réalisée par le célèbre architecte Shloupi .

    Elle m'avait adressé ses photos afin que je les partage avec Maman et Papa. Mais je n'ai pas pu. C'est peut être de l'égoïsme mais la voir si rayonnante et magnifique, loin de moi, était comme un coup de poignard pour mon coeur endormi.

    Et comme si elle m'avait faite, elle avait envoyé à Aurélianne les mêmes photos, qui, sans se faire prier, partagea avec les autres. Tu sais, Alix... Ton sourire me manque, tout comme ta petite voix chantante lorsque tu cuisines.

    Je t'entendais de mon étage, ma transformation ayant affutée mes sens. Tu étais mon petit rayon de soleil lors de mes journées funèbres. Tu vis désormais dans un cadre magnifique qui rayonne tout autant que toi, ma très chère soeur. Et tu n'es pas seule. Je sais que ton Raynald -ton mari désormais- saura prendre bien soin de toi. Bien que tu n'ais guère besoin d'un homme pour vivre.

    Tu es une personne formidable et tout à fait capable de vivre ta vie grâce à ton sourire, ta générosité et ton bon coeur. Ta passion saura te nourir, mais je suis bien rassurée de te savoir proche de Raynald. J'entends encore Maman déplorer ton départ, mais désormais elle ne jure que par ton état. Je te souhaites une magnifique grossesse auprès de ton époux. N'oublies pas de nous donner de te nouvelles, car tu restes- et restera à jamais- un membre de notre prestigieuse famille. "

    L'hiver était désormais bien ancré sur la ville, mais cette année la neige n'était pas décidé à se montrer. Angéline déplorait un peu cela car, elle adorait regarder les flocons danser au grès du vent et s'amonceler sur la terre, formant un magnifique tapis immaculé et presque intouchable.

    Mais l'heure n'était désormais plus à la magie pour Angéline. Elle avait décidé de prendre sa vie en main, de vaincre sa malédiction. Elle n'allait pas rester éternellement une créature de l'ombre, qui vit, tel un parasite, dépendante des autres à jamais.

    - Bonjour mon coeur.

    Adam venait de terminer sa journée à la caserne et entrait enfin chez lui, épuisé. La vie de militaire était une vie difficile, car il était loin de chez lui, et assez souvent. Mais Julie était toujours là pour le recevoir, le gratifiant d'un baiser suave et magnifique. Mais pas ce soir-là. Etonné, il la scruta et la belle fit un léger signe de la tête vers le coin de la maison. Intrigué, il suivit son regard et découvrit avec stupeur une invité quelque peu inhabituelle.

    Angéline était là, tranquillement assise sur le canapé. Elle l'attendait depuis une bonne heure désormais, obligeant Julie à lui tenir compagnie. Les deux femmes ne se connaissaient guère et le silence fut leur seule conversation. Adam soupira et demanda à sa femme de les laisser seul. Chose que la brune fit sans se faire prier. Elle n'était pas à l'aise en présence d'Angéline. Apolline l'aurait bien moins intimidée, mais elle...

    - Apolline.

    - C'est Angéline, désormais. Et tu le sais. Lui dit-elle, d'un ton neutre.

    Bien sûr qu'il le savait, mais pour lui Apo restera toujours Apo. Un nom était un nom et sa soeur, bien que différente aujourd'hui, était toujours sa soeur.

    - Qu'est-ce qui t'amène ? Lui demanda t'il après s'être installé à ses côtés.

    La jeune femme souffla, puis décroisa les jambes. Elle comprenait l'animosité de son frère à son égard, car leur dernier échange fut loin d'être cordial et chaleureux. Elle avait agressé Julie, prise par une démence, dû à son nouvel état. Elle en était pas fière mais elle ne pouvait revenir en arrière.

    - Je viens en paix, Adam.

    - Va droit au but et va t'en. Tu n'es pas la bienvenue ici, et tu le sais Angéline.

    Adam lui cracha ses mots au visage et cela lui fit l'effet d'un coup de poignard. Elle l'avait mérité, mais elle aurait aimé un peu d'indulgence de la part de son frère.

    - Je ne te demanderais pas pardon pour la dernière fois.

    - Et je crois que je ne l'accepterais pas.

    Elle soupira et se prit la tête entre les mains. Elle ne souhaitait pas venir ici. Elle savait pertinemment que cela allait tourner ainsi. Elle se maitrisa et ravala sa colère, avec difficulté.

    - Je suis ici pour une faveur, Adam.

    L'homme la scruta avec étonnement, et pitié. Elle ferma les yeux. Son frère allait difficilement se laisser convaincre. Elle avait perdu sa confiance, et Adam, bien que gentil, était loin de pardonner facilement.

    - Je ne te le demanderais pas si j'avais d'autre choix. Crois-moi, j'aurais aimé pouvoir me débrouiller toute seule mais...

    - Je t'écoute.

    Elle avait alors laissé un sourire ourler ses lèvres. Adam lui souriait légèrement aussi. Elle revoyait un peu de l'ancien Adam dans ce sourire.

    - Tu voyages pas mal avec ton travail, non ? Il fit signe que oui. J'aurais aimé que tu passes un message à une de mes connaissances vivant près de Dragon Valley.

    - Dragon Valley ? Qu'est-ce que tu pourrais bien trouver là-bas ?! C'est complétement dévasté !

    Elle posa ses mains sur ses genoux et tourna légèrement la tête vers son frère. Son visage était défiguré par la terreur. Dragon Valley était une ville fantôme depuis plus d'un siècle maintenant. Leur propre arrière-grand-mère, Aveline, s'y était rendue afin d'aider les scientifiques et les historiens à découvrir le mal qui avait décimé toute la population.

    - J'ai mené ma petite enquête et je crois avoir une idée sur l'origine de ce désastre, Adam.

    - Toi ?! Hurla t'il d'étonnement.

    Son étonnement était tout à fait compréhensible mais elle ne savait si elle devait être vexée ou amusée. Adam, gêné par sa propre voix, mit sa main devant la bouche tout en s'excusant. Angéline lui offrit un pâle sourire.

    - Tu sais, j'ai peut être beaucoup changé...

    - C'est peu de le dire...

    - Mais je donnerais n'importe quoi pour redevenir celle que j'étais avant...

    L'air pitoyable et la douleur qui s'émanait de la jeune femme transperça le coeur de son frère, qui lentement, posa sa main sur la cuisse de sa soeur. Ce simple contact, empli de chaleur, fit monter les larmes aux yeux d'Angéline qui détourna le regard.

    - Je vais t'aider, Apolline. Pour notre famille et parce que... je t'aime.

    Elle ferma les yeux et pleura à chaude larme. Adam avait accepté de l'aider et sans poser de question. Il savait qu'il était inutile d'insister et que sa petite soeur était prise dans un piège qu'elle seule pouvait ouvrir.

    Pendant ce temps-là, Milan s'occupait de la petite Guénièvre. C'était un jour de congé et Aurélianne travaillait sur un nouveau projet. De ce fait, Milan jouait les nourrice, mais la petite l'adorait alors cela se passait toujours à merveille. Là où elle faisait des caprices avec sa mère ou ses grands-parents, Milan arrivait à la faire sourire et lui faire abandonner ses désirs.

    Installé définitevement à la maison depuis peu, le jeune homme savourait avec extase les moments de famille qu'il entretenait avec le reste des Vauganne. Chaque soir, ils mangeaient ensemble, discutaient de leur journée, de leur envie et riaient de bon coeur. Auri avait un sourire magnifique et infatiguable. Seul bémol à ce parfait tableau : l'absence d'Angéline. On lui servait pourtant toujours une assiette et Milan pouvait voir dans les yeux bleus de ses parents la tristesse qui luisaient au plus profond d'eux.

    Mais il n'était qu'un étranger. Le petit-ami d'Auri, alors il ne se sentait pas le droit d'intervenir et donner son avis sur la situation. Tout le monde a ses problèmes, et chacun les résolvait à sa façon mais il ne voulait pas que Guenièvre souffre du comportement de sa tante.

    Le jeune homme soupira, tandis que la petite tapait avec joie sur les touches métalliques de son xylophone. Sa musique, décousu et anarchique, se répercutait contre les murs de la demeure.

    - Papa ?

    Milan releva les yeux et croisa ceux de la petite. Elle venait de l'appeler "Papa" ? La panique s'empara alors de lui et tenta de bredouiller qu'il n'était pas son père. Mais la bambine réitéra et le jeune abandonna. Il craignait juste une chose : la colère d'Aurélianne lorsqu'il lui en parlerait.

    - Mais tu te rends compte de ce que tu me demandes Apolline !? S'offusqua Azilis, sa tante qui aujourd'hui avait bien veilli.

    - C'est pas compliqué : je te demande juste de me donner des documents, tirés des archives de ta maison d'édition, sur les évènements apparus à Dragon Valley.

    Azilis soupira, et ferma les yeux. Toujours journaliste, mais plus sur le terrain, la vieille femme avait hérité de la direction du journal où elle avait mené à bien sa carrière. Mais elle n'y avait pas tous les droits, comme l'espérait sa nièce.

    - Non, je suis désolée. Je ne peux rien faire.

    - Mais tu es directrice ! Tu commandes non ?! S'offusquait Angéline.

    - Oui ma belle, mais ce n'est pas aussi simple que ça. J'ai des droits, c'est vrai, mais aussi des devoirs. Ce sont des archives interdites au public. Ordre de la mairie, voire du gouvernement. J'ai les mains liées.

    Angéline souffla avec mépris. Elle avait tant espéré que sa vieille tante puisse l'aider. Elle croisa les bras et réfléchit un moment. Son oncle Yoric était maire de la citée mais aujourd'hui décédé. Et surtout elle n'était pas proche de lui ni de ses fils. Elle ne pouvait donc pas jouer de ses relations ni de son nom. De même pour Eudes qui avait rendu l'âme quelques années plus tôt. Sur les six enfants de la génération de sa mère, il ne restait plus que Willheim, Azilis et sa propre mère, Anaïs.

    - Aveline avait pourtant donné de sa personne pour résoudre ce problème.

    - Ma grand-mère -soit ton arrière-grand-mère- s'était effectivement penchée sur la question, mais n'avait rien trouvé de bien concluant, tu sais ?

    - Il doit bien y avoir quelque chose ! Un trace écrite de ses recherches et de ses découvertes, non ?

    Azilis se prit le menton d'une main et leva les yeux vers le ciel, réfléchissant. Angéline venait de la mettre sur une piste et non négligeable. Avec un petit sourire, la vielle femme posa une main sur l'épaule de sa nièce.

    - Je ferais une petite recherche dans mon grenier. J'ai hérité d'une bonne partie des vieilles affaires de notre famille. Mais je ne peux rien te promettre...

    C'était bien plus qu'elle ne pouvait espérer. Certes, ce n'était pas ce qu'elle escomptait, mais elle saurait s'en contenter. Sans attendre, elle se jeta au cou de sa tante et la remercia du fond du coeur. Azilis lui rendit son étreinte, peu après que sa surprise fut passée.

    - Angéline est un magnifique prénom, ma belle. Même si j'aimais beaucoup Apolline, celui-ci te va mieux. Mais sache qu'un prénom ne fait pas tout... car j'ai devant moi ma précieuse petite Apolline.

    La jeune femme se dit rien et laissa sa tante la câliner comme elle faisait lorsqu'elle était plus jeune.

    Elle quitta sa tante avec le sourire. Elle progressait doucement, et se faisait quelques alliés au passage.

    - Adam, Azilis... Prochain étape : Aslinn.

    Et sans attendre, elle se rendit chez sa soeur, qui jouïssait d'un nouveau congé de maternité. La blonde était pour la troisième fois enceinte. Entendant cela, Angéline soupira. Cela lui fit l'effet d'une gifle, car on lui rapellait son retard dans l'avancée de sa vie. Elle se savait fertile, bien qu'elle ne comprenait pas comment cela pouvait se faire puisque son corps était comme mort, mais elle refusait de créer une famille avec de tels gènes.

    - Alors ?

    Aslinn tourna la page de son livre, secouant la tête avec un air désolé. Sa dernière pièce venait de capituler. Angéline s'effondra sur le sol. Aslinn avait pour tâche de retrouver ne serait-ce q'une trace de Lennart, mais la blonde lui expliqua qu'il n'existait aucun Lennart dans les registres de la ville de Meadow Glen, comme celle d'Isla Paradisio.

    - Tu veux que je regarde ailleurs ? Lui demanda alors Aslinn.

    Mais Angéline n'avait pas envie de réfléchir. Ses beaux espoirs étaient comme mort. Elle secoua la tête, mais Aslinn ne laissa sa soeur dans son désaroi. Elle se mit à sa hauteur, la forçant à la regarder dans les yeux.

    - Je sais que tu ne souhaites pas me dire ce qui te tracasses et surtout ce qui motive ton soudain interêt pour l'histoire et surtout ce Lennart mais n'abandonne pas si facilement. N'est pas Vauganne celui qui abandonne au premier obstacle.

    "Aslinn n'avait pas tort. Ce n'est pas en abandonnant que j'avancerais et que je trouverais une solution à mon problème. Si il y en avait réellement une. Il était dit, dans le grimoire d' Illarus Thumbarius, qu'il fallait détruire l'être Premier, l'Unique. Et cet Unique n'était autre que Lennart. J'en étais convaincue et mes recherches me menaient sur cette piste.

    Cet être - je me répugne à l'appeler "Homme" avait fait parler de lui durant des siècles. Aparaissant toujours sous les traits d'un jeune homme au sourire facile. La légende racontait que l'Unique serait une erreur, née de l'union entre une femme et à un être démoniaque, qui fit sa première victime lorsqu'il sortit des entrailles de sa mère. Son premier souffle fut étouffé lorsqu'il plongea ses crocs dans le cou de sa propre mère.

    Cela m'avait mis le frisson et m'empêcha de réfléchir des journées entières. Car, à force de recherche et de lecture de légende de tout temps, il m'arrivait d'avoir des flashs et de voir des scènes où j'incarnais cet "Unique"et j'ai pu entr'apercevoir le visage de Lennart dans une flaque. Cet être est fourbe et se dissimule avec délice et perversion parmi le plus commun des mortels... "

    L'hiver avait beau mener la danse des saisons, cela n'empêchait guère Milan de profiter de l'eau. La plage était toute proche de la maison, et il adorait nager, été comme hiver. Aurélianne l'avait bien traité de fou un nombre incalculable de fois, cela n'avait en rien entaché son envie de nager. D'ailleurs, il passait la plupart du temps la tête sous l'eau, armé de son tuba de son filet de pêche.

    Il récoltait quelques coquillages et les revendait parfois à prix fort. Mais la plupart restaient à la maison, souvent présentaient comme des offrandes à sa déesse Auri.

    Ce soir-là ne fit pas exception. Lorsque sa belle franchit le seuil de la maison, il lui sautait au cou et lui tendait sa découverte du jour. Au début, elle était amusée de son comportement, lui rapellant celui d'un jeune chiot, mais l'actrice était une personne qui se lassait rapidement. Mais elle aimait son petit-ami et aimait le voir sourire.

    - C'est gentil Milan. Mais j'aimerais que tu lèves le pied sur tes baignades, du moins en hiver.

    - Ne t'en fais pas, je suis résistant.

    - Si tu le dis...

    Elle en doutait fort mais ne préféra pas le dire. Après tout Milan était un adulte, jeune certes et un peu insouciant, mais il vivait très bien avant de l'avoir rencontré. Elle n'était pas sa mère, mais son amante. Elle ne devait pas mélanger les rôles.

    - Auri... Ca te dirait de sortir ce soir ? L'actrice se détacha de son étreinte et le fixa avec curiosité. J'aimerais qu'on ait un moment rien qu'à nous.

    La jeune femme baissa le regard et se mordit la lèvre. Elle en crevait d'envie, mais elle avait Guenièvre. Elle ne pouvait la laisser seule.

    - Ne t'en fais pas pour Guenièvre. J'ai déjà tout prévu. Tes parents s'en occuperont.

    - Mais ! Ils ne sont plus tout jeunes... Tenta la jeune femme.

    - Ils ont des cheveux gris, et alors ? Ils vous ont élevé, toi et tes cinq frères et soeurs. Je pense qu'avec seulement Guenièvre, ils s'en sortiront. Et puis s'il se passe quelque chose, tu as tout téléphone, et j'ai donné les coordonnées du restaurant.

    Aurélianne écarquilla les yeux avant d'exploser de rire.

    - Tu as vraiment tout prévu, ma parole.

    - Et oui. Rien n'est trop beau pour toi, ma déesse. Donc il faut bien que je fasse en sorte que tout soit parfait !

    Cela redoubla son hilarité. Milan lui tenait les mains et elle put sentir qu'il resserrait son étreinte.

    - Plus sérieusement, Aurélianne. Je veux être avec toi ce soir, c'est important. Elle hocha de la tête. Parfait ! Va donc te faire belle !

    - Mais je suis toujours belle ! Badina t'elle.

    Cela fit rire son compagnon qui lui captura les lèvres avec douceur. Il l'aimait, à en crever et son sourire était le plus beau des présents qu'elle pouvait lui faire.

    Angéline aspirait bruyamment son jus de "tomate", l'air absente, tandis qu'Eloi dégustait des pancakes. Leur dîner était plongé dans le silence. Père et fille ne sachant quoi dire à l'autre. Le bruit de la fourchette d'Eloi tintait, seul, désormais. Il releva le regard et vit Angéline regarder autour d'elle.

    - Qu'est-ce que tu cherches ?

    - Rien. S'empressa t'elle de dire.

    Elle put entendre son père soupirer tandis qu'elle reprenait son aspiration. Elle n'avait pas faim, mais il lui fallait sa dose quotidienne de sang. Elle refusait de se nourrir, mais lorsqu'elle se trouva bien mal à cause de déshydratation, elle dû abdiquer. Elle ne chassait pas, refusant de boire du sang humain. Elle se rendait alors à l'hôpital et demandait du sang à son frère. La première fois qu'elle le fit, Cyprien l'avait fixé avec stupeur et la força à lui raconter l'usage qu'elle en ferait. Elle n'avait pas pensé à une histoire et au bout d'un quart d'heure, son frère lui arracha la vérité. Après Alix, Cyprien fut le deuxième dans la confidence.

    Mais cela était un bien pour un mal, car il s'avéra compréhensif et la fourni une fois par semaine de sang frais. La banque de sang ne croulant pas sous les donations, elle était restreinte à une dose hebdomadaire limitée. Mais c'était bien assez pour qu'elle puisse survivre. Elle ne comptait pas rester ainsi éternellement, de toute manière.

    - Voilà, elle est couchée.

    La voix de sa mère la ramena à la réalité. Anaïs venait de descendre l'escaliers et s'était adressée à Eloi. Curieuse, Angéline fixa la vieille femme qui lui rendit son regard avec un sourire.

    - Elle n'a pas fait trop d'histoire ?

    - Non, étonnemment. Lorsque c'est sa mère qui la met au lit, c'est un vrai champ de bataille.

    Cela fit sourire le vieil homme. Aurélianne adorait sa fille, bien trop, et souvent leur caractère s'affrontait. Guenièvre piquait une colère lorsqu'Aurélianne allait la coucher.

    - Tout le portrait de sa mère. Commenta Anaïs après avoir embrassé la joue de son époux.

    - Les chiens ne font pas chats.

    Cela fit sourire Anaïs qui s'éloigna dans la cuisine. Angéline assista à ce débat, les yeux ronds. Son père le remarqua et lui expliqua.

    - Ta soeur n'est pas là ce soir.

    - Ah ! Fit Angéline, comprennant enfin.

    - On garde Guenièvre avec ta mère.

    - Autrement dit : je garde Guenièvre. Se dit Angéline.

    Car ses parents étaient âgés, c'était un fait, et la nuit, si la petite pleure, ils ne l'entendaient pas. Elle soupira et reprit son aspiration. Cela fit claquer la langue d'Eloi avec dégoût.

    - Bois proprement ou sors de table, Apolline !

    - C'est Angéline ! Hurla t'elle.

    Et un énième débat s'engagea, reprocha à l'une de ne pas prendre les sentiments des autres en considération, rerochant aux autres de ne pas la laisser vivre sa vie. La rengaine, lorsqu'Angéline et Eloi se retrouvaient dans une même pièce et que le dialogue était amorcé.

    La nuit avait rapidement avalé le soleil, laissant gracieusement sa place à la lune. Les lampadaires et les néons de la ville éclairaient les rues et les routes avec fébrilités. La porte du restaurant se referma derrière le couple, qui main dans la main commentait le repas qu'il venait de déguster.

    - Ce homard était à tombé !! Se délectait encore Aurélianne, un immense sourire sur les lèvres.

    - Je savais qu'il te plairait ! Se félicita Milan.

    - En voyant l'enseigne, tout à l'heure, j'ai bien crû que tu te fichais de moi.

    - Comment ça ? Demanda le jeune homme, un peu méfiant.

    - C'est pas le grand luxe, mais la nourriture est excellente. Comme quoi, l'habit ne fait pas le moine.

    Aurélianne lâcha la main de son compagnon et avança de quelques pas, inspirant profondément, les bras en l'air, et tournoyant sur elle même. Quelques feuilles tombèrent des arbres adjacents et vinrent l'accompagner dans sa ronde. Cela fit battre le coeur de Milan, car Aurélianne était magnifique sous les rayons de la lune.

    Ses bras retombèrent le long de son corps, et ses yeux toujours fixés sur le ciel.

    - La brise est si agréable.

    - C'est parce que tu as trop bû, lui reprocha légèrement Milan.

    Elle haussa les épaules et ne prit pas la peine de relever, car, de toute manière c'était la vérité. Ils avaient commandé une bouteille de champagne pour le dessert et Aurélianne avait su apprécier trois verres de cette boisson. Ses joues étaient légèrement rosées.

    - Il fait bon mais frais également. Remarqua t'elle en se massant les bras.

    C'était l'hiver et l'alcool lui avait fait oublier cela. Il la rejoignit et doucement la pris contre lui. La chaleur de Milan lui arracha un soupir de bien-être et elle se laissa couler dans ses bras. Il avait beau être plus jeune qu'elle, il savait prendre les choses en main et était mature.

    - Merci pour ce dîner, Milan.

    Il lui sourit, simplement avant de lui baiser le front. Elle aimait cela. Cette façon qu'il avait de la couvrir d'attention. Un simple baiser sur son front et la belle était aux anges. Elle réclamait de la tendresse et était servie grâce à Milan. Elle avait sû apprécier cela avec lui.

    - Auri, j'ai quelque chose à te dire.

    Elle recula et se défit, à contre-coeur, de son étreinte. Le visage de Milan était sérieux et légèrement rouge. Elle sourit et le laissa alors lui caresser la joue.

    - Je t'écoute. Dit-elle en lui prenant la main.

    Elle pouvait sentir les doigts de son petit-ami trembler contre les siens. Elle ne se moqua pas, bien qu'elle aurait pu, mais au contraire, renforça son emprise. Cela donna du courage à Milan qui lui prit les bras et plongea son regard dans le sien.

    - Aurélianne... Je t'ai aimé dès notre première rencontre.

    - Arrête, j'ai été affable...

    Il secoua la tête et lui sourit avec tendresse.

    - Non, tu étais méfiante, comme une mère se doit de l'être. Et j'ai aimé ça.

    - Tu n'es pas un peu maso...

    - Auri, s'il te plaît laisse-moi parler ! La coupa Milan.

    Elle se surprit à sursauter devant son ton mais ce qui la surprise plus encore fut le comportement de Milan. Il s'agenouilla devant elle, ses yeux toujours plantés dans les siens. Elle put sentir le rouge monter à ses joues. Elle comprenait où il venait en venir. Cela fit accélèrer sa pulsasion cardiaque.

    - Milan... je...

    Elle était déboussolée. Sa gorge était sèche et ses mains moites. La panique s'emparait d'elle. Elle avait beau être une actrice, elle n'arrivait pas à garder son calme et faire bonne figure.

    - Aurélianne Vauganne, en ce jour glaçiale, je souhaiterais réchauffer ton coeur à l'aide d'une promesse éternelle et d'un anneau afin de symboliser cette promesse. Veux-tu être mienne à jamais ?

    Elle porta ses mains devant ses lèvres, fébrile, et le souffle haletant. Le froid laissait s'échapper de ses lèvres un petit nuage de givre. Milan était devant elle, à genou, négligeant son beau costume et oubliant le givre qui parcourait le sol. Elle le regardait et vit dans ses yeux, au plus profond d'eux, une lueur d'espoir, ainsi que de peur et surtout d'amour.

    Sa propre vue se brouilla, humide de larme puis d'un simple hochement de tête, tendit sa main vers l'homme à genou devant elle. Elle n'aurait jamais imaginer un jour se marier. Elle avait abandonné l'idée le jour de son accouchement. Elle s'était vue terminer sa vie, seule avec Guenièvre, vivant de son métier et de l'amour de sa fille. Et Milan apparut, comme un vent de bon augure, plein de promesse de joie. Chaque jour était synonyme de rire et de joie.

    Aucun mot ne furent échanger, juste une étreinte qui, s'ils le pouvaient, aurait durer éternellement. Aurélianne pleurait de joie, tandis que Milan la remerciait. Mais au fond d'elle, c'était elle qui le remerciait. Elle n'était pas la meilleure des femmes. Elle s'emportait, elle criait, elle doutait... Mais ce soir, devant sa demande, elle n'avait douté. Au contraire, tout en elle hurlait d'accepter.

    Il était tard lorsque le couple rentra. Il avait décidé de marcher un peu, profitant au maximum de leur moment à deux. Ils avaient beaucoup de projet et un énorme allait venir, demandant des mois de préparation. Cela aurait exaspéré Aurélianne, d'ordinaire, mais au contraire, la jeune femme était enchantée et avait plein d'idée en tête. Milan l'écoutait, simplement, lançant parfois quelques piques qui arrachaient des reproches de la part de sa fiancée.

    Ils arrivèrent enfin à la maison, main dans la main, un immense sourire aux lèvres, lorsqu'Aurélianne décela quelque chose d'étrange dans l'atmosphère. Elle agrippa la manche de Milan et pointa l'entrée du doigt. D'un commun accord, ils courrurent jusqu'à la porte où ils découvrirent avec effroi une baguarre entre le bien et le mal. Aurélianne s'approcha de Milan qui resta interdit devant le spectacle qui se déroulait sous leurs yeux.

    Un individu affublé de blanc et de noir, cagoulé et masqué venait de remporter une bataille sur l'agent de l'ordre. Sonnée, la policière se massait les reins tout en se relevant, tandis que l'intrus se gaussait de sa victoire. L'alarme hurlait dans tout le quartier, réveillant les chiens alentours. Le voleur, apercevant Aurélianne et Milan écarquilla les yeux et prit ses jambes à son cou, abandonnant son butin derrière lui. La policière voulut le suivre mais sa défaite lui apporta quelques contusions.

    Dépité, le couple assista à cette calamité dans le silence total, les yeux ronds et la bouche bêtement ouverte.

    - Ah !

    Sans autre mot, Aurélianne se précipita à l'intérieur, laissant Milan derrière elle.

    La nuit avait continué un petit moment. Aurélianne venait de réussir à calmer Guenièvre, qui dormait dans son berceau, au-rez-de-chaussée. La petite n'avait rien subi mais l'alarme l'avait effrayé. Aurélianne avait trouvé sa fille dans les bras de sa tante, tentant de la bercer et la réconforter. Eloi et Anaïs était dans la cuisine en train de déposer plainte auprès de l'agent de police qui était venu leur prêter main forte.

    En mère protective, elle avait arraché Guenièvre des bras d'Angéline et l'avait examiné sous toutes les coutures. Sa soeur ne s'en formalisa pas, et s'éclispa, laissant place à Milan.

    Leur belle soirée fut gâchée par un cambrioleur et Aurélianne fulminait contre lui. Milan la prit alors contre lui et lui baisait la tempe. Cela la décontracta un peu mais son inquiétude pour Guenièvre était encore là.

    - Elle dort ? Lui demanda t'il.

    - Oui...

    La voix d'Aurélianne s'était résumée à un murmure à peine audible. Milan pouvait la sentir trembler contre lui.

    - Elle n'a rien.

    - Je sais... Mais je ne peux m'empêcher de penser que...

    - Tes parents et ta soeur l'aurait défendu.

    Ses parents, oui. Sa soeur, elle en doutait fortement. Mais ce n'était pas l'heure au débat. Elle était fatiguée et ne pensait qu'à une seule chose : aller dormir. Mais elle n'avait pas envie de quitter sa fille. Pas après cet évènement.

    Elle put sentir les larmes monter à ses yeux. Elle les repoussa à l'aide de ses doigts, mais Milan les remarqua tout de même. Il se plaça sur le côté et prit Aurélianne dans ses bras. La tête contre le torse de son fiancé, elle se laissa un peu aller, lâchant quelques larmes. Elle était une femme forte mais ses nerfs furent mis à rude épreuve et elle avait besoin de lâcher prise. Ne serait-ce qu'un instant.

    Milan ne dit rien, il l'écouta pleurer, tout en lui caressant les cheveux et lui embrassant le crâne. Il l'aimait : forte, faible, souriante ou triste. Elle était le centre de son univers. Et bien qu'il passait après l'enfant, il se savait chanceux et heureux.

    - Merci Milan.

    Avec un sourire, il lui baisa le front.

    - Je suis là pour toi Auri. Ne l'oublie jamais. Pour toi, comme pour Guenièvre. Après tout, je suis son père, non ?

    Cela fit doucement sourire Aurélianne, qui passa ses bras autour de la taille de Milan. Lorsqu'il lui avait dit que Guenièvre l'appelait "Papa", elle avait tout d'abord hurlé, et supplié Milan de passer moins de temps avec SA fille. Mais rien n'y fit. Guenièvre avait adopté Milan. Après maintes discussions, Milan déconcerta Aurélianne en lui disant que cela ne le dérageait pas. Alors la mère abandonna.

    Sans un mot, il guida sa fiancée vers l'étage. Il était tard et ils travaillaient tous les deux le lendemain. Mais avec un sourire séducteur, Milan lui glissa aux creux de l'oreille qu'il l'aimera bien plus fort le lendemain. Et même si elle protestait, il lui ferait l'amour comme jamais. Cela lui valut un tape sur l'épaule, faussement énervée, mais Aurélianne n'avait qu'une hâte : être le lendemain afin d'être aimée et aimer sans limite.


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  • Episode 5

    Episode 5

    La petite Guenièvre jouait, paisiblement installée sur le tapis de la salle à manger. Elle babillait sans cesse, s'exclamant avec joie. Parlant sa propre langue et étant dans son propre univers. Aurélianne avait l'habitude de l'entendre chantonner ainsi, elle ne faisait guère attention à sa petite pierre précieuse et vaquait donc à ses occupations. Installée dans le fauteuil du salon, non loin de là malgré tout, elle apprenait son texte pour son prochain rôle dans un téléfilm. Absorbée par son travail, elle ne prêtait plus vraiment attention à sa fille.

    Guenièvre jouait donc, faisant danser son jouet dans les airs et elle l'examinait sous toutes les coutures. Un grand sourire sur les lèvres. Sourire qui disparut bien vite, tout aussi rapidement que le jouet qu'elle tenait dans les mains quelques secondes auparavant.

    Episode 5

    Les sourcils tombant, elle scrutait tout autour d'elle, paniquée et déçue. Elle adorait son jouet, étant un cadeau de Milan. Certes les enfants de son âge ne s'attardaient guère sur ce genre de détails, mais la petite l'aimait énormément. Elle commença à pleurnicher.

    Episode 5

    Mais comme par magie, le jouet réapparut entre ses maisn. Elle regarda l'objet un instant, intriguée, puis reprit son jeu sans ce soucier de ce détails. Après tout, il était revenue, c'était le principal. Elle babillait donc encore, mais avec plus d'entrain. Aurélianne se tenait dans l'embrasure de la porte, et soupirait.

    - Tu pleures ou tu ris. Choisis ton camps, Guee...

    Aurélianne avait beau soupirer, elle était attendrie par son fille. Guenièvre était un ange, avec son petit caractère et son magnifique sourire qui soulignait la malice qui brillait dans ses yeux.

    Episode 5

    Plus tard dans la journée, alors qu'Eloi s'occupait de Guenièvre, Aurélianne le rejoignit.

    - Papa, je t'ai déjà dit de te reposer. Soupira Aurélianne.

    Depuis quelques temps, Eloi était facilement fatigué et passait le plus de son temps à faire des siestes. Elle était inquiète et ne voulait surtout pas qu'Eloi se surmène.

    - Ma princesse... Tu sais pourquoi les grand-parents sont là ?

    Episode 5

    Elle le fixa avec un air réprobateur. Elle n'était pas d'humeur pour l'humour. Ce fut au tour d'Eloi de soupirer. Elle rafermit sa prise sur Guenièvre qui lui tirait le gilet.

    - Aurélianne... j'ai élévé six enfants avec ta mère. Guenièvre est un ange et elle n'est pas embêtante du tout. C'est mon rôle, et surtout un plaisir de m'occuper d'elle.

    - Papa...

    - Je sais que tu t'inquiètes pour moi. Mais ne t'en fais pas. Je vais bien aujourd'hui.

    - Justement !? Prends du temps pour toi.

    Episode 5

    Eloi soupira encore. Aurélianne était têtue, il le savait. Et son entêtement était toujours un sujet de dispute. Mais aujourd'hui, il n'avait pas envie de se disputer. Il se sentait serein, comme jamais. Ses vieux os ne le faisaient plus souffrir et il était heureux. Il jeta un regard à Genuièvre qui tendait une main vers ses lunettes. Un sourire ourla ses lèvres et retint la main de sa petite-fille.

    - Comprends que m'occuper de Guenièvre, c'est du temps pour moi.

    Aurélianne ne sut quoi répondre. La petite rompit le silence en réclamant à manger. Aurélianne lança un regard à son père qui, amusé, abdiqua. Il rendit la fille à sa mère, chose qui illumina le visage de la jeune femme. Eloi était fier des ses enfants, chacuns d'entre eux. Mais Aurélianne était sa plus grande fierté : mère célibataire, pratiquant une profession difficile et publique.

    Episode 5

    Le soleil déclinait lentement. L'automne avait largement emporté les feuilles des arbres. Si la journée fut délicieuse -ni trop chaude, ni trop froide ; simplement une journée ensoleillée d'automne- un tragique évènement était en train de se produire dans la demeure familiale.

    Episode 5

    Dans le salon, l'on pouvait retrouver Anaïs et Aurélianne, en larme. Inconsolable, la vieille femme hoquetait pitoyablement. Visage engouffrait dans ses mains, elle ne pouvait regarder le spectable qui se déroulait sous ses yeux. Sa fille n'était pas mieux lotie. Elle se forçait à garder les yeux ouverts, mais c'était insoutennable, elle ne pouvait soutenir ce drame.

    Episode 5

    Eloi disparaissait. Translucide et blanchâtre, le vieil homme se tenait là, avec le sourire. Faisant face avec dignité à la Dame en Noire. Cette légende morbide était une vérité qu'il ne croyait plus vraiment. Il n'était pas fâché, ni indigné. Juste apaisé. Il savait que son temps était révolu, qu'il ne pouvait lutter contre la nature.

    - Et encore un Vauganne à mon actif ! Je deviens bonne pour faucher cette famille ! S'exclamait cette créature du mal.

    Aurélianne explosa et hurla tout son mal être. La mort se boucha une oreille à l'aide de son index squeletique.

    - Punaise, elle a du coffre, celle-ci !

    Episode 5

    - Ma fille est un peu excessive mais c'est une crème.

    - C'est ça ! Allez Papy, c'est l'heure. Donne ta mimine qu'on signe ce contrat. J'ai d'autre chat à fouetté aujourd'hui. C'est les soldes chez les Vauganne !

    - Oh ? Je ne suis pas le seul ?

    - Naaan ! Au fait, il faudrait penser à arrêter de vous reproduire autant. Ca devient dingue là haut.

    - Là haut ?

    La mort haussa les épaules puis regarda avec mépris Anaïs.

    - T'inquiète pas ma belle ! Je l'emporte avec moi, mais il sera pas perdu. Un beau palais vous attends.

    Episode 5 - Esprits, es-tu là ?

    Eloi suivit la Dame en noire, sans un regard sur sa famille. Il ne pouvait pas leur infliger une peine plus grande qu'actuellement. Anaïs aurait bien du mal à s'en remettre. Il était plus jeune qu'elle, la logique aurait voulu qu'elle parte avant lui. Mais la nature étant tout sauf logique...

    Guenièvre était là, consolant sa peluche. Un cadeau d'Eloi lorsqu'elle naquit. Elle chérissait cette poupée depuis toujours, au grand damne de sa mère qui aurait souhaité qu'elle adopte une autre peluche - une de son choix.

    Une génération trépasse laissant derrière elle une autre génération a l'avenir prometteur et plein d'embûche.

    Episode 5

    La nuit était tombée, et Anaïs restait inconsolable. Les larmes n'arrêtaient de couler. Elle n'avait même pas eu la force de s'habiller. Aurélianne avait dû prendre les choses en main. Consoler sa mère, ainsi que sa fille qui ne comprenait pas la disparition subite de son grand-père.

    - Maman...

    - Je sais Aurélianne... Je sais. Dit Anaïs entre deux sanglots. Mais je n'y arrive pas.

    Episode 5

    Angéline venait de se réveiller. Elle dormait, comme souvent dans la journée, et n'avait aucunement entendu le grabuge que le décès de son père avait causé. Aurélianne le lui avait reproché, et même sa mère. Plus bas que terre, elle tentait de faire bonne figure, loin de celles, chères à son coeur.

    - Allez Maman. Il est temps.

    Anaïs s'éloigna de sa fille et hocha fébrilement la tête. Elle n'était pas prête mais il fallait le faire. Elle disparut à l'étage, tandis qu'Aurélianne, bras croisés, observait sa soeur qui avait les yeux rivés sur l'urne de leur père. Elle soupira avec mépris. Jamais elle ne lui pardonnerait son absence.

    Episode 5

    La nuit était bien présente. Sombre comme jamais. C'était comme si le ciel pleurait également la disparition d'Eloi. Anaïs avait revêtu des vêtements plus sobre et s'était laissée guider par Aurélianne vers l'extérieur. Il n'y avait pas grand tombe dans de le jardin. Mais désormais Eloi reposait auprès de ses beaux-parents. Les voir ainsi, côte à côté ravivait la plaie béante dans le coeur d'Anaïs.

    Episode 5

    Les trois femmes de la maison étaient en larme. Anaïs pleurait bruyamment, Aurélianne tentait de retenir ses larmes, tandis qu'Angéline souffrait en silence. Les poings serrés, elle ne pouvait faire face. Voir cette stèle était comme lui mettre le nez dans la réalité. Elle croyait que ses parents étaient éternels, tout comme elle. Elle avait perdu cette notion de mortalité - étant imortelle.

    - Auri ?

    Episode 5

    La voix de Milan la fit sursauter. Aurélianne regarda légèrement derrière elle, les larmes ruisselant sur ses joues. Milan les rejoignit et voyant les mines affreuses et blafardes des trois femmes, il comprit en un instant ce qu'il s'était produit. Sans un mot, il prit sa fiancée contre lui et la serra fort contre son torse. Aurélianne se laissa faire. Il n'avait pas la force de faire bonne figure. Elle avait tenu jusque là pour le bien de sa mère et de sa fille. L'arrivée de Milan -qui rentrait du travail- déclencha chez elle et Anaïs une crise torentielle de larme et de sanglot de plus en plus déchirant.

    Episode 5

    - Pardonne moi, Auri... J'aurais dû être là.

    Aurélianne secoua la tête, le chatouillant de ses cheveux. Elle n'avait pas la force de parler. Et Milan y était absolument pour rien. Sa présence n'aurait rien changé. Son père devait partir et lutter aurait été inutile. Mais l'avoir auprès d'elle était une source de réconfort qu'elle n'aurait jamais soupçonné.

    Episode 5

    Anaïs s'était effondrée et Angéline la soutenait comme elle pouvait.

    - C'est injuste... Eloi tu es trop cruel ! C'était à moi de partir avant toi !

    - Maman...

    Anaïs repoussa légèrement Angéline qui tentait de la réconforter. Ce geste blessa la jeune femme qui ferma les yeux. Elle ne devait pas prendre cela trop à coeur. Sa mère était bouleversée, totalement instable. Chacun de ses mots n'étaient pas sincères.

    Episode 5

    - Il m'a abandonné... ll m'a abandonné... Eloi...

    Personne ne dit rien. Anaïs déversait ses larmes et sa peine, hurlant inutilement après Eloi. Angéline avait le coeur serré. Mais les larmes ne vinrent jamais. Elle se mordait les lèvres, luttant contre sa propre rage et son propre dégoût. Aurélianne ne faisait plus attention à elle, lovée dans les bras de son fiancé. Angéline croisa le regard de Milan, qui d'un faible sourire, tenta de l'apaiser elle aussi.

    Elle détourna le regard et ferma les yeux. Il n'avait pas à faire cela. Elle n'était rien pour lui. Juste une étrangère liée par le sang à sa fiancée. Une étrangère qui errait dans une maison immense où le chagrin était de mise.

    Episode 5

    Anaïs n'arrivait pas à dormir. Pourtant cela faisait une semaine déjà qu'Eloi était partit. Mais son absence était insoutenable. Elle avait l'habitude de l'avoir à ses côtés, jour et nuit. Et lorsqu'ils dormaient, elle était constamment dans ses bras. Sa chaleur, son odeur, sa voix... Tout lui manquait.

    Episode 5

    Elle s'occupait alors en cuisinant. Aurélianne lui avait d'abord reproché, car le frigo était rempli à ras-bord et personne n'avait le coeur à manger. C'était du gâchis pur et simple mais la vieille femme ne s'en souciait guère. Elle devait s'occuper les mains afin de calmer son esprit. Mais elle n'y parvenait guère souvent et les larmes, qu'elle croyait tarissable, étaient inépuisables.

    Episode 5

    Dehors, alors que le silence nocturne remplissait la ville, une apparition se dessina. Sa silhouette légèrement voûtée et son teint blanc était reconnaissable. Ambrine avait senti la détresse de sa fille et venait de rejoindre les vivants -avec autorisation de la Dame en Noire, qui, je cite : "En a assez d'entendre le vieux à lunettes se plaindre !"

    Episode 5

    Lorsqu'elle vit sa mère pénètrer dans la pièce, Anaïs lacha sa cuisson et courut se réfugier dans ses bras. Elle pleurait comme une petite fille contre le sein de sa mère. Ambrine lui tapota le dos, d'une façon maternelle et plein d'amour.

    - Pleurer est parfois nécessaire pour faire son deuil.

    - Je suis une bien piètre mère. Auri est bien plus forte que moi.

    Episode 5

    - Chacun réagit face à la mort à sa manière, Anaïs.

    La vieille femme se détacha du fantome et la fixa avec curiosité. Elle se souvenait de son père, Lawrence, lorsqu'Ambrine disparut. Il avait longtemps pleuré, seul dans sa chambre, mais jamais il n'avait montré devant ses enfants. Elle le connaissait pourtant par coeur et avait réussi à lui rendre un véritable sourire. Anaïs souriait elle aussi, malgré sa tristesse. Sa mère avait raison. Elle ne pouvait blâmer personne de la mort de son époux. Aurélianne avait son pilier, Angéline pleurait surement en silence et elle... Elle, elle verserait des larmes pour deux s'il le fallait.

    Episode 5

    Ce matin-là, Aurélianne et Milan prenait leur petit-déjeuner ensemble, dans un silence confortable. La petite Guenièvre chantonnait au fond de la pièce, s'amusant avec la buée sur les vitres qui étaient à sa hauteur.

    - Nous devons faire une fête.

    Milan s'étouffa légèrement Il scruta sa fiancée qui continuait de manger.

    Episode 5

    - Tu t'entends Auri ?

    - Milan. Elle déposa sa fourchette et le fixa droit dans les yeux. Ma fille fête son anniversaire et j'ai envie qu'elle en ai un bon souvenir.

    - Elle est trop jeune pour s'en souvenir.

    Milan savait qu'Aurélianne se forçait en organisant un goûter d'anniversaire. Elle pleurait encore la nuit, il l'entendait assez comme ça.

    Episode 5

    - Mon père est mort, c'est vrai. Mais la vie doit continuer. Guee n'a pas à subir notre peine.

    - Aurélianne, Guenièvre est une enfant intelligente, si on lui explique.

    - C'est déjà fait !

    Milan secoua la tête. Aurélianne avait déjà tout organisé. Elle était comme ça, à prendre des décisions par elle même. Cela le peinait mais c'était également une des raisons qui l'avait séduit.

    - Pourquoi m'en parler si tout est déjà fait ?

    Son ton était teinté de reproche. Cela fit tousser Aurélianne qui le fixa, les yeux grands ouverts. Milan ne protestait jamais.

    - Milan !

    - Il n'y a rien ajouté, Auri. J'ai bien compris : c'est ta fille. Tu décides, mais sache que je pense au bien de ta fille, tout autant au tien.

    Sur ces mots, Milan quitta la table et rejoignit Guenièvre qui babillait avec enthousiasme. Aurélianne baissa le regard sur son assiette, touchée par les mots de son fiancé.

    Episode 5

    Apercevant le jeune homme, la bambine tendit les bras vers lui tout en hurlant "Papa !". Ce simple mot mit du baume au coeur à Milan qui, avec un immense sourire, prit la petite dans ses bras. Guenièvre lui rendit son étreinte tout en riant.

    - Ma petite perle.

    - Papa !

    - Qu'est-ce qu'il y a ?

    - Ze t'aime !

    Un immense sourire ourla les lèvres de Milan, qui sentit ses yeux s'humidifier. Il baisa alors le front de sa fille de coeur et la serra de nouveau contre lui. Elle ressemblait tant à Aurélianne, avec un côté mignon que le charme adulte avait substitué chez sa fiancée mais ils adoraient ses deux femmes.

    - Je t'aime aussi ...

    Episode 5

    - Maman ?

    - Dans la salle de bain ! Hurla Anaïs.

    Aurélianne frappa un léger coup contre le bois de la porte et entra sans se faire prier. Guenièvre dans les bras, elle s'avança vers sa mère, qui terminait de se laver les mains.

    - Qu'est ce qu'il y a ?

    - Maman, surtout ne le prend pas mal mais... J'ai une surprise pour toi !

    Episode 5

    - Qu'est ce que tu es allée encore m'inventer ? Se lamenta la vieille femme.

    Elle n'était pas d'humeur pour les plainsanteries de sa fille. Elle était fatiguée.

    - Le prend pas comme ça ! Moi qui pensais te faire plaisir... Ronchonna la jeune femme.

    - C'est bon, c'est bon... Alors cette surprise ?

    - Elle t'attends dans la salle à manger !

    Le ton enjoué d'Aurélianne la fit sourciller, mais elle ne dit mot. Sa fille, lassée de la voir si incertaine, la poussa hors de la pièce, le sourire aux lèvres.

    Episode 5

    - Mais enfin !

    - Maman ? Râler ? Ca c'est une première ?! Elle aurait déteind sur toi ? Dit une voix grave tout en désignant Aurélianne.

    Anaïs resta la bouche ouverte un long moment avant de plonger dans les bras de son fils.

    - Arrête de dire n'importe quoi... Pesta la jeune mère.

    - Mon fils... Tu... te...

    - Je sais Maman. Ca faisait longtemps. Je suis désolée.

    La mère secoua la tête, en signe de négation. Elle n'avait pas vu Cyprien depuis des semaines, trop occupé avec son travail et ses quatres enfants. Elle soupira d'aise dans ses bras. Il dégageait la même chaleur qu'Eloi.

    Episode 5

    - L'important c'est que tu ailles bien. Comment vas-tu ?

    - Ahaha ! Bien Maman ! Très bien même si les enfants sont de vraies terreurs. C'est épuisant.

    - Il faut dire qu'avec Ambre... Et bien disons que tu aimes faire les choses en double.

    Ambre, la femme de Cyprien avait vécu deux grossesses, et chacune fut multiple. Cyprien était le père de deux paires de jumeaux : Maïwen et Aedan puis Joela et Nina.

    Episode 5

    Les invités débarquèrent un à un, sauf Adam, ce qui laissa un goût amer dans la bouche d'Anaïs. Adam ne venait jamais la voir depuis son départ. Il vivait sa vie, loin de sa famille, entre son boulot et sa femme. Ce n'est pas qu'elle n'appréciait Julie mais cette fille retenait son fils loin d'elle.

    - Mamie ?

    Anaïs revint vers Guenièvre, qui bien emitoufflée dans son manteau, attendait pour souffler ses bougies. La petite fêtait son anniversaire. Avec un tendre regard et un sourire triste, elle baisa le front de sa petite-fille.

    - Si ton grand-père était encore là, il serait fière de toi.

    Episode 5

    Anaïs regarda derrière elle, une dernière fois. Certes Adam n'était pas présent, mais Alix également. Aslinn, Cyprien, Aurélianne et Apolline... Elle leur sourit et rejoignit sa famille dans le chant traditionnel des anniversaires.

    Episode 5

    La petite Guenièvre adopta les traits d'une charmante petite fille, blonde comme sa grand-mère et aux yeux aussi profond que sa mère. Elle mangeait calemement sa part de gâteau tandis que les adultes discutaient deleur vie respectives.

    Episode 5

    Guenièvre se leva et put appercevoir la raison du regard surpris de sa grand-mère. Adam était là, sur le pas de la porte, un grand sourire aux lèvres, malgré la sueur qui perlait de son front. C'était l'hiver et il transpirait.

    - Adam ?

    - Je suis désolé ! J'ai fait aussi vite que j'ai pu ! Haletait il à bout de souffle.

    Episode 5

    Sans attendre, elle plongea dans ses bras et le serra fort contre lui. Elle ne connaissait pas très bien son oncle, mais sa présence mettait sur les lèvres d'Anaïs un sourire qu'elle n'avait guère vu depuis des jours.

    - Bon anniversaire, ma grande.

    - Merci Tonton !

    Episode 5

    La petite fille était heureuse, elle pouvait désormais vivre sa vie, sans être trop dépendante des adultes. Elle regardait sa famille se chamailler gentimment. Elle sourit mais déplora l'absence de sa tante Angéline. Elle avait cependant fait l'effort d'être là, le temps des festivités, mais cette dernière avait rapidement filé, dès que la petite avait souflé ses bougies.

    Episode 5

    Angéline était déjà sortie lorsque le soleil se couchait. Elle ne pouvait rester chez elle. Elle se sentait accusée de tout et par tous. Sa propre famille la rejetait pour une raison dont elle n'était pas coupable. Son état n'était pas de son fait. Certes, coucher avec Lennart était une erreur - SON erreur- et cela lui avait coûté très cher. Elle souhaitait en garder le secret mais Adam, Aslinn et Aurélianne, ainsi que sa propre mère, n'étaient pas dans le secret. Et on lui reprochait sans cesse son absence, son manque d'enthousiasme...

    Episode 5

    Enervée, hors d'elle, folle de rage... C'était ainsi qu'elle se sentait. Et lorsqu'elle était en colère, elle avait soif. Ses petites briquettes de sang congelé étaient loin de la satisfaire. Elle avait beau lutter, son instinc prenait le pas sur sa raison. Elle chassait alors.

    Episode 5

    Même si ce n'était que pour une faible dose. Pouvoir se délecter de sang chaud était comme une jouissance extrême pour elle. Elle se sentait vivante que lorsqu'elle plantait ses crocs dans une chair ferme et chaleureuse. Mais ses victimes étaient rarement consentantes. Il lui fallait alors ruser, emloyer son charme, quelques uns de ses pouvoirs de persuasion, son charisme.

    Episode 5

    Mais cette nuit, étancher sa soif ne suffit pas. Elle sentait le sang récemment absorber bouillir dans ses veines. Elle s'en voulait. Elle aurait dû être là pour son père. Elle avait râté les dernières années de sa vie, à se complaindre et en s'enfermant dans sa pièce secrète.

    Episode 5

    Elle frappa, et frappa encore sur ses personnages ridicule à l'effigie de ses êtres magiques qu'elle pouvait compter comme ses pairs, désormais. Mais cela, elle le refusait. Elle était humaine !

    - Je suis humaine ! Jamais je ne tuerais quelqu'un...Je suis...Je suis morte...

    Episode 5

    Il était tard et la petite Guenièvre déambulait dans la maison. On venait de lui ordonner d'aller se coucher, mais trop grisée par sa nouvelle liberté, elle ne se sentait pas fatiguée. Elle trouva la porte de la chambre de sa grand-mère ouverte. Intriguée, elle poussa la porte. L'atmosphère était reposant mais il y avait quelque chose de triste dans l'air. Guenièvre pouvait le sentir au plus profond d'elle même. C'était comme un film qui défilait sous ses yeux. Un film muet où sa grand-mère ne cessait de pleurer.

    Elle ferma les yeux et s'avança vers le lit où elle s'agenouilla sur le sol. C'était comme si on la poussait à faire cela. Elle sentait comme une masse noire se cacher en dessous du matelas.

    Episode 5

    - Vous n'avez rien à craindre, vous savez ?

    Elle lui parla, comme si elle parlait à un être humain. Mais la chose devant ses yeux se recula, comme apeurée. Guenièvre lui sourit alors et la silhouette s'apaisa.

    - Je sais que ce n'est pas votre faute. Vous êtes retenue ici, n'est-ce pas ? C'est ma grand-mère... C'est sa chambre et vous avez envie de l'aider, n'est-ce pas ?

    La silhouette hocha de la tête et Guenièvre lui sourit de nouveau. Sa grand-mère était une gentille personne qui ne cessait de pleurer après son grand-père. Guenièvre avait pris beaucoup de temps pour comprendre qu'Eloi ne reviendrait jamais. Elle tendit une main vers la créature sous le lit et l'invita à la rejoindre.

    Episode 5

    - C'est gentil à vous. Mais ma grand-mère ne souhaiterait pas vous retenir ici. Vous êtes libres de partir et de rejoindre les vôtres. Ils doivent vous manquer, non ?

    L'homme secoua de nouveau la tête et gratifia d'un immense sourire la petite, qui la salua d'un geste de la main. Elle voyait de la reconnaissance flotter dans le regard bleutée de cette créature.

    - Guenièvre !!! Je t'ai dit d'aller au lit ! Hurlait Aurélianne en bas des escaliers.

    - J'y vais !!

    La créature la retint par la manche, le regard curieux.

    - C'est ma mère. Elle crie beaucoup mais elle est gentille. N'ayez pas peur, elle ne vous fera rien.

    Et pour cause : Aurélianne était incapable de voir cette créature. Un dernier geste de la main et Guenièvre referma la porte derrière elle en direction de sa chambre.


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  • Episode 6

    Episode 6 - Ce couchant inexistant

    Le printemps s'installait paisiblement sur la ville de Meadow Glen. C'était le matin et la maison s'éveillait doucement sous le chants des oiseaux enthousiasmes. Aurélianne peinait à sortir de son lit, le corps lourd d'une nuit bien trop courte. Guenièvre avait longtemps refusé à aller se coucher, prétextant une discussion importante avec un nouvel ami. Sa mère avait donc passé une bonne partie de la soirée à négocier avec son entêtée de fille.

    Episode 6 - Ce couchant inexistant

    Ce fut le pas lourd et l'esprit embrumé qu'elle rejoignit le rez-de-chaussée. Une voix suraiguë l'accueillit. D'ordinaire, elle aurait sourit à son petit rayon de soleil mais ce matin. L'esprit en vrac, elle dépassa sa fille en filant droit vers la cuisine où elle prit sa part de gaufre. Anaïs observait sa fille tout en soupirant. Elle avait beau être mère et près de l'âge adulte, sur ce point, Aurélianne n'avait pas grandi. Elle détestait qu'on lui impute ses heures de sommeil.

    - Tu pourrais répondre à Guenièvre. Lui reprocha Anaïs alors qu'elle s'installait à table.

    Tout ce qu'elle obtint fut un soupir de sa part. Anaïs échangea un regard désolé avec sa petite fille qui la rassura d'un sourire.

    Episode 6 - Ce couchant inexistant

    - Maman, je suis désolée pour hier.

    Aurélianne avala sa bouchée mais ne dit rien. Ni ne lança un regard vers sa fille. Déçue, la petite baissa les yeux et d'une petite voix demanda à quitter la table. Anaïs le lui accorda puis regarda la petite débarrasser son assiette. Sur le ton de la confidence, et plein de reproche elle interpella sa fille.

    - C'est une enfant.

    - Et ? Elle n'est plus un bébé. Elle devrait obéïr sans discuter et arrêter de fabuler comme ça. Elle est trop âgée pour avoir des amis imaginaire.

    Anaïs croisa les mains sur ses genoux et fixa son aînée avec déception. Si l'on ne pouvait laisser les enfants rêver, qu'advenaient-ils une fois adulte ? Aigri et sans rêve ?

    Episode 6 - Ce couchant inexistant

    - Je ne me souviens pas t'avoir privé de tes rêves, avec ton père, lorsque tu avais son âge.

    - Maman ! Ca n'a rien à voir ! Moi, je ne parlais pas au vide.

    - Tu étais infernale. Guenièvre est une gentille petite fille qui ne souhaite que ton attention. Mais tu es trop absorbée par ton travail et ton amourette avec Milan.

    En entendant cela, Aurélianne s'étouffa avant de regarder sa mère disparaître à son tour dans la cuisine, où la petite chantonnait tout en rangeant les restes.

    - Maman !! S'insurgea Aurélianne.

    Mais Anaïs fit la sourde oreille. Elle déglutit et regarda à nouveau son assiette. Elle venait d'être touchée en plein coeur. Elle subissait ce qu'elle venait de faire à sa fille : être ignorer. Elle se mordit la lèvre et commençait à regretter son comportement.

    Episode 6 - Ce couchant inexistant

    Guenièvre revint vers elle, la bouche en coeur tout en chantonnant. Elle avait passé outre sa tristesse et venait à sa mère, toute souriante. Angéline se trouvait derrière elle, et souriait elle aussi, chantonnant avec sa nièce. Cela énerva au plus haut point la mère qui se leva d'un bond et foudroya du regard sa fille. Guenièvre stoppa sa chanson et recula d'un pas.

    - Maman ... ?

    - Arrêtez de chanter ! C'est le matin bon sang !

    - Tu trouves pas que tu exagères là, Aurélianne ? Lui reprocha Angéline

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    - Tu viendras me parler lorsque tu auras des enfants, Apolline !

    - C'est Angéline !!! Hurla à son tour sa soeur.

    Guenièvre lutta contre les larmes, et lorsque le bus klaxonna dehors, elle se précipita vers l'extérieur, sans un mot. Voyant cela, Anaïs soupira et cria à son tour sur ses filles.

    - Suffit ! Vous êtes totalement puérils ! Aurélianne, dépêches-toi de t'habiller et d'aller à l'école. Guenièvre à oublier son sac à cause de vous. Quant à toi, A-po-lline, insista intentionnellement Anaïs, tu vas me faire le plaisir de te calmer. Même si tu as raison, Aurélianne élève sa fille comme elle le souhaite.

    - Mais Maman...

    - Je sais... Tu t'inquiètes pour Guenièvre, mais laisse le temps au temps, ma fille. Cette petite saura apprivoiser sa mère, comme elle a su le faire avec nous.

    Anaïs donna une petite tape sur l'épaule de sa fille puis disparut dans la salle de bain en reprenant l'heure que Guenièvre chantonnait peu de temps avant.

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    - Ils sont en retards ! Pestait la jeune femme, tout en faisait les cent pas dans la maison.

    Milan était là également, tranquillement appuyé contre un mur, tout en se nettoyant les ongles, il regardait sa fiancée maugréer contre leurs invités absents.

    - Laisse leur le temps d'arriver. On est en semaine, tout le monde travaille, Auri.

    - Et ? Je suis bien à l'heure moi !

    Cela fit pouffer Milan qui scruta sa belle avec un sourire moqueur. Elle le remarqua et haussa un sourcil.

    - Quoi ?!

    Il se détacha du mur et la rejoignit. Il prit ses mains dans les siennes et la força à se calmer. Sa belle était sur les nerfs depuis ce matin. C'était là la raison première de sa dispute avec Guenièvre. Il déplorait cela, mais la petite a fini par pardonner à son entêtée de mère.

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    - Auri, calme toi. Je sais que tu t'inquiètes mais tes frères et ta soeur ne vont pas tarder. Laisse leur le temps de se préparer.

    Elle baissa les yeux et se mordit la lèvre. Elle n'aimait pas être en retard. Elle avait rêvé une meilleur organisation pour son mariage. Et Milan le savait pertinemment. C'était pour cela qu'il agissait avec une telle nonchalance.

    - Mon Auri, je sais que tu rêvais d'une union sous le couchant, mais c'est ainsi...

    - Je sais Milan... J'ai bien le droit d'être dégoutée, non ?

    - Bien sûr, lui sourit-il avec amour. Mais le plus important ce n'est pas le moment, mais notre promesse non ?

    Elle lui sourit à son tour et lui caressa la joue. Elle aimait à la folie son futur époux et pour rien au monde -même un couchant- elle ne ferait un pas en arrière.

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    Il faisait nuit noire lorsque tout le monde arriva enfin. Angéline descendit de son étage, pomponnée comme jamais. Elle n'avait guère d'occasion de se mettre sur son 31. Elle découvrit avec joie l'assemblée : Aslinn et Théophile, toujours aussi inséparable, Adam et sa femme Julie, enceinte de quelques mois. Cyprien est venu seul car Ambre devait veiller sur ses enfants, tous atteinds d'un rhume carabiné. Alix n'avait pu se joindre à eux, car Aurélianne et Milan avait décidé au dernier moment du jour de la cérémonie. Angéline déplorait l'absence de sa jumelle qui vivait sa vie à Rosellia.

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    Ce qui donnait le sourire à Angéline, c'était de voir la tête de la mariée. Elle n'arrêtait pas de rouspeter, fustigeant sa famille et les blâmant.

    - A cause de vous, j'ai pas le droit à mon mariage de rêve.

    - Tu n'avais qu'à pas décider de la date aussi arbitrairement ! Lui lança Aslinn, par dessus son épaule.

    Ah ! C'était exactement ce qu'Angéline lui avait dit le matin même, mais elle, elle récolta des insultes et des reproches, très vite tempérés par Anaïs. Mais là, c'était Aslinn : Aurélianne ne dira rien.

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    Et cela réjouissait la cadette plus que de raison. Un sourire narquois ourlait ses lèvres, lorsqu'Aurélianne rejoignit son futur époux son l'arche. Avec ce mariage, Angéline avait un faible espoir de voir sa soeur quitter la maison, comme les autres. Ainsi elle n'aurait plus à supporter son sarcasme constant et ses reproches futiles. Elle jubilait dans son coin, lorsqu'Anaïs le remarque. D'un froncement de sourcil, elle lui intima de se concentrer sur l'évènement.

    - Quitte moi ce sourire, jeune fille.

    Mais Angéline ne fit rien. Elle ne pouvait s'en empêcher. Dans sa tête, elle chantonnait " Libérée, délivrée" en boucle.

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    - J'ai longtemps cru que je ne trouverais pas de partenaire. Pas après la naissance de Guenièvre, mais je peux dire que c'est grâce à elle qui j'ai pu te connaître Milan. Je t'ai d'abord pris pour un prédateur sexuel. Cela fit rire l'assemblée alors que Milan se grattait le haut du crâne, gêné. Mais ton sourire et ton regard sincère m'ont convaincu rapidement du contraire. La confiance aveugle qu'avait Guee pour toi laissa mon coeur s'ouvrit à toi.

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    - Aurélianne, je n'ai jamais rencontré femme aussi exceptionnelle que toi.

    - J'aime à croire que je suis unique ! Répliqua t'elle avec fierté.

    - Ca, pour être unique, tu l'es. Surtout à mes yeux, dans mon coeur. Sans toi, je ne serais pas l'homme que je suis actuellement. Je goûte chaque jour à différents amours : le tien, celui de ta famille et ... Guenièvre.

    La petite laissa un petit hoquet de stupeur lorsqu'elle entendit cela. Elle considérait Milan comme son père, mais ne l'appelait plus "Papa", de peur d'être envahissante.

    - J'espère que tu m'acceptes comme ton père Guenièvre. Dit Milan à son attention.

    La petite hocha du chef avec vigueur, incapable de pleurer sous ses larmes. Touchée, Aurélianne essuyant une larme de sa main gantée, tandis qu'Anaïs réconfortait sa petite fille.

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    - Aurélianne Vauganne, acceptes-tu de renoncer au nom que tes parents t'ont offert pour adopter le mien. Il n'est en rien prestigieux mais il est mien. Je suis heureux de pour le partager avec toi et ta fille - nôtre fille. Mais à part mon nom et mon amour, je n'ai pas grand chose à t'offrir. Quelle est ta réponse ?

    - J'accepte ! Je serais folle de refuser ! Ton amour est tout ce qui m'importe. Milan, j'accepte de devenir ta femme.

    Avec un sourire ému, le jeune homme cercla l'auriculaire de sa toute récente femme. Elle avait les yeux embuée et cela fit sourire Milan qui essuya avec tendresse ses larmes.

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    Sous le regard de chacun des invités, le couple échangea un tendre baiser, scellant ainsi leur promesse éternelle, prenant pour témoin la famille d'Aurélianne. La fillette fixait sa mère avec bonheur et fierté. Elle ne souhaitait qu'une chose : voir sa jolie maman avec le sourire.

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    La faim tiraillait chacun des estomac présent ce soir-là. Alors sans attendre, Aurélianne et Milan décidèrent de couper la pièce montée. De toute façon, le buffet était froid - et donc immangeable- et vu l'heure tardive, la plupart des invités étaient éreintés et n'aspiraient qu'à aller se coucher -elle la première.

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    Après un bref discours de la part du marié, chacun se servit. Aurélianne resta là, les resgardant se servir, lorsqu'elle hurla tout en se prenant les cheveux.

    - Mon mariage de rêve !! Se lamentait-elle.

    Cela fit rire ses soeurs et sa mère, chose qui redoubla sa déception. Anaïs posa une main sur son épaule et la gratifia d'un sourire.

    - Il n'y a aucun mariage qui se passe comme on l'escompte. Ca te fera un merveilleux souvenir dans quelques années, Aurélianne.

    - Je ne crois pas... Toute cette nourriture qui va être jetée, cette ambiance de nuit...

    Sa mère lui tapota le dos et l'invita à rejoindre les autres dans l'annexe où les convives entamaient les festivités avec des rires.

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    Milan s'était installé avec Guenivère, qui jouait avec sa part de gâteau, plus qu'elle ne la mangeait. Il l'observa un moment avant de lui parler.

    - Qu'est-ce qui te tracasse ?

    - Oh ?... Rien.

    - Je te connais, Guenièvre. Et "rien" n'est pas un mot de ton vocabulaire.

    Elle lui sourit faiblement puis replongea son regard sur sa part de gâteau.

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    - C'est juste que j'ai un peu de mal à comprendre...

    - Comprendre quoi ?

    - Ton mariage, avec Maman. Qu'est-ce que je deviens la dedans ?

    Milan croisa les bras et fixa la petite. Elle était fébrile et le rouge colorait ses joues. Cela fit sourire Milan. Elle restait une enfant et malgré ses mots lors de l'échange de l'anneau, elle n'en avait pas saisi toutes les nuances.

    - Rien.

    - Rien ? Mais Milan...

    - Apelle moi Papa, comme lorsque tu étais petite.

    - Mais...

    - Guenièvre, je t'ai élevé, certes pendant une courte période, mais j'ai assisté à tes premiers mots et à tes premiers pas également. Je l'ai déjà dit tout à l'heure : tu es ma fille, devant la loi et surtout dans mon coeur.

    La petite laissa une petite larme s'échapper de ses yeux et offrit un immense sourire à Milan, qu'elle apella Papa. Aurélianne arriva à cet instant, encore dépitée par sa réception.

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    Elle s'installa auprès de ses frères, ignorant sa fille et son époux. Elle n'avait aucune envie d'engager une conversation sérieuse. Elle était éreintée et irritable. Une table plus loin, Aslin, Angéline et Julie dégustaient le gâteau tout en discutant de chose et d'autre. Aslinn et Julie partageait leur expérience de grossesse, tandis qu'Angéline écoutait en silence. Elle se sentait en retard, comme toujours.

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    Tout le monde était rentré, ou tout du moins dans la maison. Aurélianne profitait de la fraicheur de la nuit pour se calmer. Après réflexion, elle avait eut beau râler, pester, protester, elle ne pouvait rien contre l'emploi du temps de chacun. Ils avaient tous une vie et elle n'était pas le centre de la terre. Elle avait tendance à oublier ce point. Son univers n'était autre que sa fille, Milan et son travail.

    Alors qu'elle marchait dans la cour, elle foula du pied une fleur. Etonnée, elle se baissa et la ceuillit délicatement avant d'en humer le parfum. C'était le printemps. Elle avait toujours souhaité se marier un jour de printemps, sous un soleil couchant, depuis sa plus tendre enfance. Mais elle prenait conscience que le plus important n'était pas le moment, mais la personne avec qui on se lie.

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    Elle regardait le ciel et inspira profondémment. Elle regrettait sincèrement une chose : l'absence de son père. Elle avait laissé les jours couler sans se soucier de la mortalité. Ses parents n'étaient pas bien jeune, surtout sa mère. C'était là la véritable raison de sa décision hâtive. Elle aurait très bien pu se marier sans cérémonie, mais là, ce fut Milan qui assista. Il ne voulait pas qu'Anaïs se sente délaissée, et Aurélianne ne put lui donner tort. Elle regarda alors en direction de la tombe de son père et aperçut Aslinn qui pleurait. La pauvre n'arrivait pas à se remettre du décès de leur père.

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    Elle s'approcha sans un bruit de son aînée. Elle croyait qu'elle pleurait, mais la blonde était juste là, simplement penchée, la tête entre ses mains. Aurélianne passa un bras dans le dos d'Aslinn qui sursauta légèrement à son contact.

    - Tout va bien ?

    Question stupide. Aurélianne ne savait bien, mais elle ne savait quoi dire d'autre. Aslinn secoua la tête, en signe de négation. "Pas étonnant" se dit avec sarcasme Aurélianne.

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    - Je suis désolée, Auri.

    - De quoi ? D'être triste ? Je peux pas t'en vouloir pour ça.

    - Non... Mais pleurer le jour de ton mariage... Je voulais résister mais...

    Aurélianne ressera sa prise sur la taille de son aînée. Aslinn voulait être forte, pour elle et ses trois enfants, mais même elle pleurait parfois. Aurélianne lui offrit un léger sourire, attendri et chaleureux. Cela surprit Aslinn qui la regarda sans comprendre.

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    - On a tous perdu notre père, je ne vois pas pourquoi je serais la seule à avoir le droit de pleurer, Aslinn.

    - J'aurais tant aimé être là... J'aurais dû être là. En tant que fille... Papa...

    - Cela n'aurait rien changé. J'étais là, et Maman aussi. Nous n'avons rien pu faire. Il n'y avait rien à faire. Son heure était révolue.

    Aslinn hocha du chef, faiblement. Aurélianne resta un long moment à ses côtés, sans mot dire. Juste comme ça, une main sur sa hanche, se tenant fermement près d'elle.

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    Une nouvelle matinée, une nouvelle journée d'école pour Guenièvre. Les premiers furent difficile car elle n'arrivait pas à trouver une place parmi sa classe, mais elle rencontra son cousin, Robinson -deuxième fils d'Aslinn- et les autres l'ont trouvé sympathique. Guenièvre était assez timide et effacée, mais son sourire était envoûtant. La petite fille ne rechignait plus à aller à l'école. Ce fut même en sautillant qu'elle monta dans le bus.

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    Il était donc l'heure de se lever pour les plus jeunes. Anaïs, elle vaquait à ses occupations, comme les corvées, tandis que les jeunes mariés étaient encore au lit. Enfin, surtout Milan qui ronflait légèrement. Aurélianne était levée depuis longtemps et n'avait cessé de réfléchir à sa situation. Il faisait nuit lorsqu'elle s'était installée dans le canapé de la chambre, dans le noir, ne souhaitant réveiller son époux.

    Son époux... Cela la faisait encore sourire. Elle réalisait avec peine que l'anneau qui ornait son doigt n'était pas qu'un accessoire, mais un symbole d'éternité.

    - Auri ... ?

    Elle se retourna et vit que Milan était réveillé. Il l'a fixé, tout en se frottant les yeux. Elle devait lui dire. Elle le rejoignit et lui baisa le front. Etonné, mais heureux, Milan voulut se relever pour la prendre dans ses bras, mais elle l'en empêcha.

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    - Qu'est-ce qu'il se passe ?

    Le visage d'Aurilliane était plus que sérieux. Le jeune homme n'avait que très rarement vu sa femme dans cet état. Ses sourcils, légèrement froncés, ses yeux bleus déterminés. Il posa une mais sur la cuisse de sa femme, et sentit qu'elle était fraîche, voire glacée.

    - Tu es levée depuis combien de temps ? Tu es frigorigiée ! Viens vite sous les couvertures !

    Mais la belle renforça sa prise sur l'homme qu'elle aimait. Milan retint son geste et le fixa avec curiosité et anxiété.

     

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    - Milan. J'ai quelque chose à te dire...

    D'ordinaire, il aurait répliqué, plaisanté, mais le ton de sa voix, le tremblements de ses mains, indiquaient qu'Aurélianne était très sérieuse. Il caressa sa cuisse, comme pour la réconforter, lui donner du courage. Mais au plus profond de lui, il était épouvanté. Voulait-elle le quitter ? En avait-elle assez du jeunot qu'il était ? Elle n'était pas satisfaite de lui au lit ?

    - Je...Je suis enceinte, Milan.

     

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    - Pardon ? Begaya le jeune homme.

    Aurélianne détourna le regard et répéta. Enceinte... Ce mot résonnait dans sa tête, comme dans son coeur, accélèrant le rythme cardiaque. Son sang fit un tour rapide et lui fouetta les sens. Sans un mot, il prit sa femme contre lui, et la souleva dans les airs, tournant sur lui même, riant comme un dément. Aurélianne se tenait à lui, terrifiée de tomber.

    - Milan ! Stop !!! Je t'en prie !

     

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    - C'est vraiment vrai ?

    - Vraiment vrai, mon Milan.

    Il lui captura les lèvres, ni croyant toujours pas. Aurélianne riait doucement. Elle appréhendait la réaction de Milan. Il n'avait jamais réellement parlé enfant ensemble. Elle avait Guenièvre et était entièrement satisfaite avec sa petite fille.

    - Tu peux me poser s'il te plaît ?

    Elle était certes heureuse, mais très à l'aise, ainsi jucher dans ses bras. L'homme lui captura de nouveau les lèvres et la déposa sur le lit comme si elle était en verre.

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    - Je suis désolée Milan.

    - "Désolée" de quoi ?

    - J'ai pas pris mes précautions... Et me voilà enceinte.

    Milan la regarda droit dans les yeux. Elle détournait le regard. Jamais Aurélianne ne faisait ça. Il lui souleva délicatement le menton et la força à le regarder. Elle se trompait lourdement. Jamais il n'aurait été plus heureux qu'à cet instant. Une famille, il espérait en fonder une. Il l'avait trouvé en les personnes d'Aurélianne et Guenièvre, et savait que sa compagne était satisfaite ainsi. Il aurait été égoïste de sa père que de quémander un autre enfant à sa femme.

    - Tu me fais le plus beau des présents, Auri. J'espérais tant avoir mon enfant un jour.

    Il avait l'oreille contre le ventre d'Aurélianne qui le regarda avec stupeur. Elle n'aurait jamais imaginé que Milan avait de telle aspiration.

     

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    - J'ai l'impression de te forcer la main.

    - Non... Pour tout te dire, ma belle, j'ai toujours souhaité avoir des enfants.

    - Ah bon ?

    Cette révélation choqua Aurélianne, mais Milan n'y prêta pas attention, trop affairé à caresser le ventre de la jeune mère.

    - Pourquoi tu ne m'en as jamais parlé... Je me sens bête maintenant.

    - Car tu as déjà Guenièvre et je sais que tu ne souhaitais pas soumettre à nouveau ton magnifique corps aux épreuves de la grossesse.

    Cette réponse valut au jeune père une tape sur le haut de tête. Il se frotta le crâne, faussement blessé, tandis qu'Aurélianne riait.

     

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    Il allait être père. Ca, jamais, il n'oublierait cette matinée. Aurélianne faisait de lui le plus heureux des hommes. Il embrassa le ventre si plat de sa femme avec tendresse. Touchée, Aurélianne essuya le coin de ses yeux. Elle avait vécu sa première grossesse seule, et c'était une des raisons qui ne lui donnait envie de vivre une nouvelle grossesse. Mais avec Milan à ses côtés, elle savait qu'elle serait en sécurité, choyée et aimée.

     

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    Plus tard, dans la semaine, Aurélianne avait eu rendez-vous chez le médecin afin de vérifier son état. Anaïs était ravie d'apprendre que sa fille attendait de nouveau un enfant. Elle ne se lassait jamais de ses petits-enfants. Elle pouvait en compter désormais 9, sachant qu'Adam venait être le père d'un petit-garçon et qu'Alix attendait elle aussi très bientôt son enfant.

     

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    - Ah !! Je suis si excitée !! Chantonnait la vieille femme.

    Cela avait amusé Milan au départ, mais voilà trois jours qu'Anaïs s'extasiait devant le ventre de sa femme. Il aimait sa belle-mère mais elle commençait à user sa patience.

    - On a compris Maman ! Intervint Aurélianne.

    Elle en avait elle aussi assez, mais ses protestations n'entamaient en rien l'enthousiasme de la grand-mère qui enchaîna :

    - Oh ! Il faut vite trouver un prénom. C'est une fille ou un garçon ? Un petit garçon changerait un peu, non ? Quand penses-tu Milan ? Tu dois te sentir seul, avec autant de femme.

     

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    - Anaïs, calmez-vous. Ce n'est pas très bon pour votre coeur, tout cette excitation.

    - Mon coeur va très bien ! Oh ! J'adorerai avoir une petit garçon aussi roux qu'Eloi !

    - Ca suffit, Maman ! La coupa Aurélianne. On ne connait pas encore le sexe. Et quand bien même, on garderait le secret ! Je veux avoir la surprise.

    - Mais... Aurélianne... Tenta Milan.

    - On en a déjà discuté. Je veux la surprise.

    Anaïs secoua la tête et tapota l'épaule de son gendre avec compassion. Il lui sourit, comme pour la remercier. Il ne pouvait rien faire contre Aurélianne et son mauvais caractère. Et avec sa grossesse, c'était pire.

     

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    C'était l'heure d'un énième petit-déjeuner. La petite Guenièvre avait mangé en silence, en compagnie de son tout nouveau Papa. Depuis l'annonce de la grossesse d'Aurélianne, la petite avait perdu le sourire. Elle s'inquiétait pour elle, bien sûr mais pour sa mère.

    - Tu veux en parler ?

    La petite releva la tête et fixa de ses yeux pleins d'espoir Milan qui avalait sa dernière bouchée.

    - Papa, ca fait mal d'avoir un bébé ?

    Cette question, somme toute légitime, fit sourciller le jeune homme. Il était un homme, et de ce fait, il ne vivrait pas la grossesse comme Aurélianne et ne souffrira aucunement comme elle.

     

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    - Tu sais, le corps humain et notamment des mamans est fait de sorte que la maman, lorsque le bébé vient au monde souffre le moins possible.

    - J'ai des copines à l'école qui disent que ca fait et que parfois les mamans et les bébés... Il meurent.

    Milan déposa sa fourchette et regarda sa fille de coeur avec tendresse. Elle s'inquiétait plus pour sa mère et le bébé que pour elle. Elle était adorable.

    - Je ne vais pas te mentir, Guenièvre, tu es une petite fille intelligente. C'est vrai, parfois des mamans et des bébés meurent, comme des papy et des mamies. C'est la vie, et les circonstances font que ne peut rien y faire. Mais les docteurs sont très forts aujourd'hui, et c'est très rare qu'un accouchement se passe mal.

    - C'est vrai ?

    Milan hocha de la tête et la petite souffla, rassurée. Sa maman était tout pour elle, et elle était si heureuse d'avoir un petit frère ou une petite soeur.

     

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    - Allez ! Fini les discussions tristes ! Il est l'heure de se préparer pour aller à l'école.

    Guenièvre fit signe qu'elle comprenait. D'un élan, elle sauta de sa chaise et commença à se diriger vers la salle de bain. Mais elle s'arrêta et tourna légèrement la tête vers Milan qui commençait à débarrasser la table. Sentant son regard sur lui, il inclina la tête, curieux.

    - Milan... Je... Je peux avoir un câlin ? Demanda timidement Guenièvre.

    Un sourcil du jeune homme se tordit. Guenièvre l'appelait parfois Papa, parfois Milan. Et cela le rendait triste. Même s'il savait qu'il fallait du temps à la fillette pour se faire à l'idée. Le regard de Milan dû mettre la puce à l'oreille à la petite car elle porta une main gênée sur sa bouche et détourna le regard.

    - Je te pardonne pour cette fois, Guenièvre.

    Il ouvrit les bras et la petite s'élança avec bonheur dans les bras de son papa.

     

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    - Je t'aime Papa !

    - Je t'aime aussi ma chérie.

    - Un jour, je me marierai avec toi ! C'est sûr !

    Milan se mit à gorge déployée devant les propos de la petite. Elle était si mignonne. Elle lui baisa la joue et, bien qu'un peu étonné, le jeune homme lui rendit son baiser avec une tendresse infinie et douce.

    - Je crois que Maman ne sera pas d'accord, Guenièvre.

    - T'en fais pas ! Je saurais me débrouiller !

    Son rire redoubla et d'un geste leste, laissa la fillette retomber sur ses pieds et lui intima de se hâter de se préparer pour sa journée d'école. Il souhaita qu'elle garde à jamais sa candeur et son innonence, qu'aucun homme ne vienne souiller son sourire et son coeur.

     

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    Alors que Guenièvre venait de refermer la porte afin de prendre le bus, Angéline tapotait sur le clavier avec rapidité. Elle était en pleine discussion depuis des heures, mêlant recherches et espoir. Elle avait réuni les informations qu'Adam, Aslinn et sa tante Azilis avaient réussi à trouver. Mais peu de chose en était ressorti. Elle restait pourtant persuadée que la clé de sa chaîne se trouvait à Dragon Valley : la ville fantôme.

    L'ordinateur tinta, lui indiquant qu'elle venait de recevoir un e-mail. Curieuse, elle prit la souris de sa main doite et s'empressa d'ouvrir son nouveau courier. Il venait d'Alix. Heureuse, Angéline parcourut sans attendre le contenu.

     

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    " Coucou ! J'espère que tout va bien à la maison, et qu'Auri ne t'en fais pas trop baver. Je me souviens de son état lors de sa dernière grossesse, et c'était une vraie plaie. Restes forte, surtout, Angéline, car Guenièvre aura besoin de toi. Cette enfant est spéçial, tu l'as déjà remarqué et senti, non ?

    Mais bref, là n'est pas la question, je t'écris car j'ai trouvé quelqu'un qui pourra peut-être t'aider. Je tiens cette information d'un habitant de l'île de Rosellia. Beaucoup de légende se passent à Dragon Valley, comme tu as pu t'en apercevoir lors de tes recherches. Selon les résultats de tes recherches, il y aurait eu beaucoup de cas de disparition subite dans cette région, au fil des millénaires, surtout lors du moyen-âge. Le culte du vampire étaient très fortement lié aux êtres de mal, de la nuit et du vice. Le fait que ces êtres doivent se nourrir de sang est quelque chose d'effrayant, bien que j'ai la conviction que toutes les victimes de l'Unique n'étaient pas avides de cruauté et se nourrissaient avec le juste nécessaire. Parfois, les victimes étaient des animaux.

     

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    Angéline, rassure-moi... Tu ne touches pas au biches, j'espère ? Bien que je comprendrais cet... cet acte, j'ai dû mal à l'accepter. Ce sont des êtres innocents qui n'ont rien demandé. Mais en y réfléchissant bien, tu es comme cette biche. Tu es innocente, et tu t'es trouvée au mauvais endroit au mauvais moment. Si seulement je ne t'avais pas délaissé pour jouer à la donzelle amoureuse avec Raynald... Rien de tout cela ne te serait arrivé. Tu vivrais sûrement heureuse avec un homme à tes côtés, mère de deux ou trois enfants, et t'épanouissant dans l'art. D'ailleurs ?! Peins-tu encore ? J'aimerais une de tes toiles chez moi.

    Je ne vais pas tarder à filer, le bébé est de plus en plus virulent mais il refuse de mettre le nez dehors. Tu images ça, toi ? Ce petit monsieur refuse de me laisser en paix alors qu'il a 15 jours de retard... Il aura ma peau ! Mais je l'aime déjà si fort. Avec Raynald, nous n'avons qu'une hâte : qu'il soit dans nos bras.

    Je te fais d'énorme bisous, ma très chère soeur. Tu trouveras les données que Boyd a bien gentimment voulu me donner.

    Ps : Prends soin de Maman. La mort de Papa a dû lui donner un sacré coup au moral comme au coeur. Mais avec ma grossesse, je ne peux pas quitter l'île. Serre la fort pour moi, d'accord ?

                                                                                                                                                                                                                                       Alix

    Angéline ouvrit le fichier joint, non sans émotion. Alix était un amour qu'elle menait ses recherches d'elle même. La vampire avait tout bonnement refusé d'impliquer sa jumelle dans cette histoire mais voyant qu'elle n'avançait guère, elle dû abdiquer. Elle nota l'adresse et le nom de la personne que devait contacter ainsi que son adresse e-mail. Elle le joindrait plus tard. Elle devait encore réfléchir aux évènements.

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    Loin des soucis de sa cadette, Aurélianne profitait de la journée de l'amour pour prendre un peu de temps avec son époux. Milan avait proposé à sa femme de prendre un peu l'air, la suppliant de bien vouloir lui accorder un peu de son temps.

    Aurélianne avait beau être enceinte, elle continuait son travail d'actrice. Son tout jeune ventre rond était une aubaine pour son prochain rôle : une future mère qui rencontrait des difficultés lors de sa grossesse. Ce télé-film traitait sur l'handicape l'amour des parents malgré la différence de leur enfant. 651

    - Mais pourquoi tu m'as emmener ici !? Y'a rien dans ce parc.

    Milan soupira, Aurélianne n'avait pas arrêter de râler depuis qu'ils étaient sortis de la maison. Il espérait qu'un changement d'air la rendrait plus joyeuse, mais à croire que cette grossesse était un véritable fardeau pour elle. Ses hormones n'arrêtaient pas de jouer avec elle et son caractère était soit accentué, soit effacé. Et là, c'était des larmes, des larmes, et des larmes. Milan pensait pas qu'elle serait ainsi et commençait presque à regretter de l'avoir mis enceinte.

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    - Si tu ne veux pas rester, tu peux toujours rentrer. Finit par lui dire son époux.

    Choquée, la belle ouvrit la bouche, sans un son. Eberluée, elle tapa du pied sur le sol et commença à s'en prendre à Milan.

    - Aurélianne, je t'aime mais là tu m'agaces. Ta grossesse ne doit pas être une excuse pour être invivable et chiante.

    - Chiante ?! Moi je suis chiante ?

    - A râler toutes les deux secondes ? Oui, très. Mais je t'aime.

    Il souriait alors qu'il se penchait pour ramasser des oeufs. C'était le printemps et il avait juré à Guenivère de lui ramener des oeufs. La petite avait insité pour les accompagner, mais Milan lui expliqua qu'ils avaient besoin d'être que tous les deux, afin de se retrouver un peu. Elle n'avait pas réellement compris ce que Milan avait voulu lui dire, mais elle était attentionnée.

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    Pendant ce temps, à la maison, Angéline planchait sur un dessin. Crayon en main et équerre dans l'autre, elle tracait des lignes sans trop savoir où cela la menait. Elle se redressa et regarda son "oeuvre" avec dégoût. Les mots d'Alix lui avait donné envie de se remettre au dessin et à la peinture mais tout ce qu'elle arrivait à dessiner étaient des horreurs sans nom, et surtout pas des dessins.

    - Pourquoi je n'y arrive pas... Soupira t'elle, tout en posant son front sur sa planche.

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    - C'est parce que t'es pas heureuse, Tante Apolline !

    Angéline regarda vers le sol, où Guenièvre jouait avec sa peluche. Etonnée par les propos de sa nièce, la jeune immortelle se tourna légèrement sur son tabouret et la fixa, perplexe.

    - C'est Angéline.

    - Angéline, Apolline... Je sais plus moi à force !

    La vampire soupira et abdiqua. Elle qui avait interdit l'accès à son étage à toute la maison, depuis que Guenièvre était assez grandre monter les marches, elle n'arrêtait pas devenir "chez elle". Apparemment, la petite adorait passer du temps avec elle. Et Angéline ne comprenait pas en quoi.

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    Après tout, il fallait bien le reconnaitre : elle ne souriait guère, elle s'occupait très peu de sa famille et vivait recluse. Alors pourquoi le plus jeune membre de la maison lui courrait après comme un chien réclamant de l'attention.

    Et puis, elle avait cette façon de l'analyser. Angéline n'avait plus dessiné depuis son changement d'état. Elle ne sentait plus capable de voir l'avenir, de voir les couleurs de ce monde et de profiter de sa beauté. Elle soupira et croisa les jambes. Non, elle se détestait et détestait sa vie. Mais elle avait beau se battre pour la changer, rien n'y faisait.

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    - Allez ! On sourit ! Dit Guenièvre après avoir lâché sa poupée.

    Angéline la fixa avec suprise. Mais sur les hanches, un immense sourire sur les lèvres, la petite l'observait avec impatience. Mais la jeune femme n'était pas d'humeur à sourire. Elle n'y arrivait pas.

    - Si tu ne le fais pas, je t'appellerais Apolline !

    A ses mots, la vampire tiqua et foudroya la plus jeune du regard. Et cela l'amusa encore plus. Angéline abandonna tout en soupira

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    - Tu es bien la fille de ta mère. Lui dit Angéline.

    - Pourquoi ? Parce que je souris ?

    - Non, parce que tu obtients tout ce que tu veux.

    Le sourire de Guenièvre ne quitta pas ses lèvres. Elle pencha la tête sur le côté et ferma les yeux, heureuse.

    - C'est parce que je ne suis pas la seule à le vouloir, Angéline.

    - Pardon ? Begaya, incrédule, la plus âgée.

    - Au fond de toi, tu voulais sourire.

    Perdue, la vampire fixa sa nièce avec curiostié. Elle était une étrange enfant, capable de bien des choses extraordinaire mais son plus grand pouvoir était de pouvoir lire en son prochain.

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    Il avait beau faire gris, il faisait bon. Et Aurélianne s'était un peu adoucie. Les mots de son époux l'avait un peu frappé. Elle se rendit compte qu'elle se comportait comme une vraie diva, chose qu'elle se refusait. Elle alla rejoindre Milan et s'était excusée. Il l'avait alors invité à danser, chose qu'elle accepta sans concession.

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    Ils dansaient que très rarement, mais Aurélianne savait Milan excellent danseur et qu'il conduisait avec brio la plus piètre cavalière. Avec son léger ventre rond, elle arrivait encore à se mouver avec douceur et élégance, mais sa démarche était parfois bancale et elle s'épuisait rapidement.

    - Je suis heureux de retrouver ton sourire, ma belle Auri.

    - Je me sens stupide, tu sais ? Je n'arrive pas à me contrôler.

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    - Je suis là pour ça.

    - A subir mes humeurs ?

    - Hum hum... Concéda le jeune homme. Mais pas que : pour te donner le sourire.

    Aurélianne gloussa alors qu'il la berçait. Leurs mains jointes sur le ventre de la future mère offraient une légère chaleur. Aurélianne ferma un oeil et se raidit légèrement. Milan le sentit et s'enqui alors de l'état de sa femme.

    - Ce n'est rien. Lui répondit-elle. Le bébé est très actif aujourd'hui. Surtout depuis ton sermon.

    - C'est mon bébé ! Il sait quand j'ai raison et quand sa mère a tort.

    Aurélianne lui donna un léger coup de coude, le prévenant qu'il allait trop loin. Elle put sentir un autre coup dans son ventre au même instant.

    - Ah ! Tu vois !

    - Je vous en prie, faites que ce ne soit pas un garçon...

    - Ben pourquoi ? S'étonna bêtement Milan.

    - Pour qu'il ne puisse pas avoir ton caractère tiens !

    Milan, faussement humilié, commença à souffler dans le cou d'Aurélianne. La belle cria avec surprise et joie, puis se détacha de l'étreinte de son homme avant de filer d'un pas léger. Amusé, Milan lui courrut après, amusé par cette femme capricieuse qui était la sienne.

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    Cette nuit-là, Anaïs se trouvait sur le pas de la porte. Ils venaient de subir une nouvelle tentative de cambriolage. Aurélianne qui était éreintée avec sa grossesse, n'avait pas quitté sa chambre. Pourtant l'alarme avait sonné très violemment, mais la jeune femme avait le sommeil lourd. Angéline était absente, comme souvent à cette heure de la nuit, et Milan s'occupait de recouher Guenièvre.

    Anaïs était donc seule avec l'officier de police et lui tenait la jambe, alors que la fonctionnaire ne souhaitait qu'une chose : partir.

    Episode 6 - Adulte ou enfant ?

    - Et là ? Vous voyez ? C'est un autre de mes petits-enfants ! Lorenzo qu'il s'appelle ! Il est magnifique n'est-ce pas ? Ma fille l'a mise au monde il y a deux jours.

    La femme en uniforme secoua la tête, sans trop prêter attention aux propos de la vieille gateuse qui lui faisait face. Elle n'avait qu'une idée en tête : filer et aller se coucher. Son service était terminé depuis longtemps, elle avait fait un extra en venant prendre la plainte de cette citoyenne.

    - J'aurais mieux fait de casser une patte... Se dit-elle.

    Et Anaïs continua, inlassablement, tout en lui montrant des photos, à lui présenter ses 10 petits-enfants dont elle est si fière.


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